Au cours des dernières années, les actifs dans les indices ESG passifs ont connu une croissance exponentielle. Selon des rapports récents, les actifs mondiaux sous gestion (AUM) liés à l’ESG ont grimpé de 2,2 trillions de dollars en 2015 à 18,4 trillions de dollars en 2021.
Cependant, cette montée en puissance soulève des questions essentielles : l’essor des actifs ESG est-il réellement synonyme d’investissement passif, ou s’agit-il d’une stratégie active déguisée ?
Un contexte historique et des leçons tirées de la crise de 2008
Dans ma carrière à Deutsche Bank, j’ai été témoin des turbulences des marchés, notamment pendant la crise financière de 2008. Cette période a révélé des failles dans les approches d’investissement traditionnelles, incitant les investisseurs à rechercher des solutions plus durables et responsables. L’émergence des investissements ESG était en partie une réponse à ces crises, visant à mieux aligner les objectifs de durabilité avec la performance financière. Mais attention, les méthodologies ESG évoluent constamment, rendant difficile la catégorisation de ces investissements comme « passifs ».
Les investisseurs doivent être conscients que les critères d’investissement ESG ne sont pas standardisés. Les différences dans les notations des agences et les méthodologies d’exclusion engendrent un risque actif non négligeable. Les chiffres parlent clair : les écarts de suivi entre les indices ESG sont significatifs et témoignent d’une gestion active déguisée. Prenons par exemple le MSCI US ESG Leaders Index, qui présente un surpoids de 5,3 % en Microsoft et un sous-poids de 7,0 % en Apple, illustrant une gestion comparable à celle des fonds actifs.
Analyse technique des indices ESG
En analysant les performances des indices ESG, il est évident que les écarts de suivi sont en hausse. Les investisseurs doivent donc scruter les facteurs de risque et de rendement associés à leurs choix d’indices. Les différences de surpoids et de sous-poids, même au sein de la même famille d’indices, comme le montre le cas des indices MSCI US ESG Leaders et Universal, soulignent l’importance de la diligence raisonnable dans le choix d’une stratégie d’investissement ESG.
De plus, la disparité des niveaux de risque entre les indices ESG nécessite une attention particulière. Les investisseurs doivent aligner leurs objectifs ESG avec la stratégie choisie, en s’assurant que le niveau d’ESG est proportionnel au risque actif engagé. Les tendances récentes montrent que, malgré une amélioration des notations ESG globales, de plus en plus d’entreprises sont exclues des indices, augmentant ainsi la complexité de l’investissement ESG.
Implications réglementaires et perspectives de marché
Les implications réglementaires de l’investissement ESG sont également essentielles à considérer. Avec des normes en constante évolution et une pression croissante pour une plus grande transparence, les gestionnaires d’actifs doivent naviguer dans un paysage complexe. La nécessité d’intégrer des données ESG requiert des décisions actives concernant les fournisseurs de notations, les types d’entreprises à exclure et la gestion des risques liés au carbone.
En conclusion, bien que l’ESG soit souvent perçu comme une approche passive, les dynamiques sous-jacentes révèlent une nature intrinsèquement active. Les investisseurs doivent poser des questions critiques sur les moteurs de rendement et ne pas se contenter de classer leurs investissements sous un simple label ESG. Grâce à des outils de construction de portefeuille modernes, il est possible d’atteindre des niveaux d’ESG élevés tout en minimisant les risques, mais cela nécessite une vigilance et une adaptation constantes à un environnement en évolution rapide.