Dans un contexte où le marché boursier américain est plus concentré que jamais, les investisseurs se retrouvent face à un véritable dilemme. La part des dix plus grandes entreprises représente actuellement 33,35 % de la capitalisation boursière totale, un chiffre qui fait écho aux excès de la bulle internet des années 2000. Alors, quelles en sont les implications pour la diversification des portefeuilles ? En tant qu’analyste fintech avec plus de 15 ans d’expérience, dont une partie à la Deutsche Bank, je vous propose d’explorer cette question ensemble.
Une analyse de la concentration du marché
La concentration du marché boursier américain a atteint des niveaux sans précédent, enregistrant un bond de 115 % par rapport à un creux de 25 ans en 2015. À cette époque, les dix plus grandes entreprises ne représentaient que 15,52 % de l’indice. En 2020, ces niveaux historiques de concentration ont été dépassés, et aujourd’hui, nous constatons un marché en surcharge, dépassant de 38 % les excès des périodes précédentes.
Cette situation soulève des questions cruciales : comment les investisseurs peuvent-ils diversifier efficacement leurs portefeuilles dans un tel environnement ?
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : alors que l’indice Russell 1000 offre une exposition nominale à 1 000 actions, l’efficacité réelle de cette diversification ne s’élève qu’à 59 actions, un chiffre qui représente un minimum historique. De plus, la diversification offerte par cette classe d’actifs fondamentale a diminué de 70 % au cours de la dernière décennie, exacerbant ainsi la crise de concentration à laquelle nous faisons face.
Diversification égalisée : une illusion ?
Face à cette concentration, de nombreux investisseurs pourraient être tentés d’adopter une stratégie de pondération égale. Cependant, cette approche se révèle problématique. En effet, bien que la méthode de pondération égale semble être une solution simple pour contrer la concentration, elle induit des constructions de portefeuille radicalement déséquilibrées. Peut-on vraiment croire que toutes les entreprises devraient avoir une exposition égale dans un marché aussi inégal ?
Les coûts opérationnels liés à la gestion d’un portefeuille égalisé sont également considérables, avec un turnover moyen de 71 % depuis 2000. Ce chiffre est d’autant plus préoccupant que le turnover a varié entre 44 % en 2012 et 132 % au plus fort de la bulle internet, illustrant ainsi une instabilité chronique dans les stratégies de pondération égale. En outre, la performance des portefeuilles égalisés a considérablement souffert, affichant une sous-performance persistante dans presque toutes les conditions de marché depuis 2014. L’illusion que la pondération égale peut offrir une diversification adéquate s’estompe face à la réalité d’un marché dominé par quelques grandes entreprises.
Vers une approche multifactorielle
Pour surmonter les défis posés par la concentration du marché, il est impératif d’adopter une approche plus nuancée. Un modèle multifactoriel pourrait fournir une diversification plus efficace en ciblant des moteurs indépendants de surperformance historique. En redistribuant les poids selon les primes de risque – et non par une approche agnostique – il est possible d’augmenter le nombre d’actions efficaces à 385, représentant une amélioration de 554 % par rapport à la diversification par capitalisation boursière.
Les résultats montrent que le modèle multifactoriel non seulement imite les meilleures années de performance de la pondération égale, mais les surpasse également de manière significative au cours des dix dernières années. En effet, cette approche peut générer une surperformance annualisée de 99 points de base par rapport à la méthode de pondération égale, qui a affiché une sous-performance annualisée de 10 points de base.
En conclusion, alors que la concentration du marché boursier américain demeure un défi majeur pour les investisseurs, il est essentiel de repenser nos stratégies de diversification. La pondération égale, bien qu’attrayante en théorie, peut conduire à des déséquilibres importants dans les portefeuilles. En adoptant une approche multifactorielle, les investisseurs peuvent mieux naviguer dans cet environnement complexe et retrouver un équilibre dans leurs portefeuilles. Et vous, êtes-vous prêt à explorer de nouvelles stratégies pour diversifier vos investissements ?