Alors que les régulateurs envisagent d’élargir l’accès des investisseurs de détail aux marchés privés, la question essentielle réside non pas dans l’opportunité d’accorder cet accès, mais plutôt dans la capacité de la structure de ces marchés à le soutenir. Les défis liés à l’illiquidité, à la transparence des rapports de performance et aux incitations mal alignées entre les gestionnaires de fonds et les investisseurs institutionnels sont déjà préoccupants. L’introduction de petits investisseurs pourrait aggraver ces problèmes au lieu d’ouvrir de véritables opportunités de démocratisation.
Pour répondre à cette problématique, de nouvelles législations ont été mises en place, telles que l’ordonnance exécutive de l’administration Trump intitulée Démocratiser l’accès aux actifs alternatifs pour les investisseurs des 401(k), émise en août dernier.
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Les initiatives européennes et leurs implications
Les autorités européennes ne restent pas en reste. Par exemple, le gouvernement britannique a fixé un seuil d’investissement minimum dans des fonds d’actifs à long terme à 10 000 £, tandis que l’Union Européenne propose des fonds d’investissement à long terme sans minimum requis. Bien que les marchés privés illiquides ou « semi-liquides » soient désormais accessibles à une majorité d’investisseurs, il est crucial de comprendre leurs limites avant de s’y engager.
Les défis de la performance des marchés privés
Évaluer la performance réelle des marchés privés s’avère complexe. Les rendements rapportés sont souvent opaques et difficilement comparables à des références précises. De plus, la nature illiquide de ces investissements complique la situation. En général, les fonds de capital-investissement sont souvent structurés avec des maturités de dix ans, mais très peu respectent les délais de distribution de capital.
Une analyse de Palico sur 200 fonds de capital-investissement a révélé que plus de 85 % n’ont pas réussi à restituer le capital aux investisseurs dans le délai imparti. De nombreux fonds de capital-risque performants prennent également plus d’une décennie pour atteindre une sortie réussie. Les marchés secondaires offrent peu de solutions, car les transactions sont sporadiques et souvent effectuées à un prix inférieur à la valeur nette des actifs.
La saturation du marché et ses conséquences
La saturation des marchés privés a entraîné une baisse des objectifs de performance. Les taux de rendement interne (TRI) typiques ont chuté de 25 % en 2000 à environ 15 % aujourd’hui. Pour compenser cette situation, certains fonds ont réduit ou supprimé le taux de barrière traditionnel de 8 %, tout en augmentant leur part des gains en capital au-delà du niveau historique de 20 %. Cela garantit que les gestionnaires de fonds maintiennent leur rémunération, même lorsque les rendements se compressent.
Un changement dans la dynamique de profit
Le moteur de profitabilité de l’industrie a évolué, se concentrant davantage sur l’accumulation d’actifs que sur les rendements d’investissement. Par exemple, Apollo gère environ 700 milliards de dollars en crédit privé, contre 150 milliards de dollars en capital-investissement. Cela suggère que les gestionnaires de fonds privilégient leurs intérêts au détriment de ceux de leurs clients. Les frais de gestion et de conseil chez Blackstone ont dépassé les frais de performance dans sept des dix dernières années fiscales, un modèle qui se répète dans tout le secteur.
Les nouveaux produits 401(k) proposés par les sociétés de capital-investissement aux investisseurs de détail suivent cette même tendance, mettant l’accent sur des expositions prévisibles aux investissements immobiliers et au crédit plutôt que sur des opportunités plus compétitives de capital-investissement et de capital-risque.
Les risques pour les investisseurs de détail
Les investisseurs de détail doivent être conscients des problèmes d’agence qui prédominent sur ces marchés. Les gestionnaires de fonds bénéficient souvent de la flexibilité de contrôler les coûts et la structure de leurs propres rémunérations, laissant les investisseurs dans une position désavantageuse. Dans le cadre d’une gestion défaillante, remplacer un partenaire général (GP) sous-performant nécessite souvent l’approbation de 75 % des investisseurs, un seuil élevé qui laisse la plupart des gestionnaires en place, même en cas de pratiques douteuses.
Les liens personnels et professionnels entre les exécutifs des partenaires limités (LP) et les sociétés de capital-investissement compliquent également la responsabilité. Par conséquent, la plupart des investisseurs institutionnels ont pris conscience de leur manque d’influence sur les comportements des gestionnaires de fonds et ont commencé à réduire leurs engagements envers les gestionnaires externes, optant plutôt pour la création de divisions internes de gestion d’actifs alternatifs.
Pour répondre à cette problématique, de nouvelles législations ont été mises en place, telles que l’ordonnance exécutive de l’administration Trump intitulée Démocratiser l’accès aux actifs alternatifs pour les investisseurs des 401(k), émise en août dernier.0
